Priscilla Saunier : « L’échec n’est jamais simple, il faut savoir rebondir ! »

mars 9, 2020

Priscilla Saunier est une ancienne entrepreneure, aujourd’hui retournée dans le monde du salariat. Après une reprise glorieuse de l’entreprise familiale, elle a connu l’échec. Aujourd’hui reconstruite, elle a su rebondir grâce à l’aide que lui a apportée l’association 60 000 rebonds, et prendre du recul sur cette situation délicate. Témoignage.

1- Priscilla, tu as repris l’entreprise familiale, notamment pour la redresser. Comment se sont passés ces années de gérance ?

L’objectif c’était de redonner un angle très axé clients à toute l’entreprise. On est allés, l’équipe et moi-même, rencontrer l’ensemble des clients tout au long de leur parcours de construction de maisons. C’est notamment grâce à cette démarche, que nous avons eu toutes nos idées de transformation.

On est donc partis de toutes leurs demandes et de leurs réclamations, pour pouvoir redresser l’entreprise. Cela a eu un effet sur les ventes ( puisque l’on a revu toutes les offres de l’entreprise ), et le taux de satisfaction des clients. ( sourire ) On a d’ailleurs eu un taux de recommandation qui a permis une nette progression de l’entreprise, sur la première année. De fait, cela nous a permis au bout d’un an, d’avoir + 50% de chiffre d’affaires, et de diminuer nos ressources et nos coûts. C’était à l’époque en 2017. On a ainsi pu retrouver un équilibre presque parfait !

Donc qu’est-ce qui n’a pas fonctionné ?

Cette année-là était donc très satisfaisante, mais surtout pleine d’espoir ! En 2018, en revanche, nous avons eu une vraie surprise. Nous étions accompagnés par des garants, qui donnaient des assurances à nos clients. 3 de ces garants ont arrêté leur activité et déposé le bilan. C’était des garants étrangers, qui s’autoassuraient entre eux. En réalité, c’était un scandale à l’assurance, monté de toutes pièces. Il s’est écroulé comme un château de cartes ! Du coup, nous nous sommes retrouvés avec une incapacité de mise en production – puisque légalement, nous n’avons pas le droit d’ouvrir les chantiers sans assurance.

À la base, nous avions 18 millions d’encours d’assurance pour couvrir toute notre production de maisons. Au final, on s’est retrouvé avec 5 millions en janvier. Donc il a fallu, tout au long de l’année 2018, retrouver des partenaires financiers. Très difficilement, nous sommes remontés à 13 millions d’encours, fin 2018. Cette période était très angoissante – personnellement ! – avec beaucoup d’impacts sur la santé. C’était vraiment compliqué !

Mais cela n’a pas suffi ! Faute d’ouverture de chantiers et malgré un carnet de commandes plein, nous nous sommes retrouvés en cessation de paiement mi-décembre.

2- Penses-tu, avec le recul, que la liquidation judiciaire de ton entreprise est dû à de mauvais choix ou de mauvaises décisions ?

À ce moment-là, mon équipe et moi-même avions recherché toutes les solutions possibles de courtier en assurances et de revente de l’entreprise. Ce que je n’avais pas vu arriver, c’était l’entourloupe des garants.

Au moment où j’ai repris l’entreprise, je n’avais pas réalisé que le courtier n’était pas de bonne foi. Il savait qu’en France nous ne retrouverions pas de partenaire. Les seuls choix que l’on avait, c’était d’être accompagnés par ces partenaires étrangers. Leur chute était un évènement que personne n’avait anticipé dans le monde de la construction, car nous n’étions pas les seuls ! Nous n’avions pas anticipé que ces partenaires tomberaient si vite et de cette manière-là. Surtout qu’ils étaient tous liés, les uns aux autres. Donc effectivement, la mauvaise décision a été de ne pas s’être suffisamment informés sur la santé des partenaires, que nous faisions rentrer dans nos projets.

3- Comment on se sent, lorsque l’on est à la tête d’une entreprise et que l’on doit gérer ce type de crise ?

En fait, on est tiraillé entre deux choses : continuer à faire tourner la boîte et ne pas céder à l’inquiétude et le stress.

Pour moi, continuer de faire tourner l’entreprise était la seule manière de se donner de l’air et de donner confiance à d’autres partenaires. Il fallait absolument, dans notre cas, que ça fonctionne. Il fallait donc avoir le tempérament positif. Être aussi de bonne humeur avec ses équipes, les pousser vers le haut et garder la motivation, pour ne pas ruminer sans cesse. Les nuits sont très sombres dans ces moments-là. L’inquiétude, l’angoisse et la peur de se planter sont constamment présentes. L’avenir, qui est alors incertain, vous arrive dessus comme un nuage noir dont vous ne voyez pas la fin. En réalité, on se demande quand cela va repartir et se terminer. C’est clairement hyper angoissant !

Et face à tes salariés ? Parce que tu as fait le choix d’être très transparente avec eux. Comment tu te sentais vis-à-vis d’eux au quotidien ?

Soutenue ! Soutenue parce que sur l’ensemble de l’année, à chaque fois, nous étions dans la recherche de solutions. Tout le monde se mobilisait ! On avait mis en place une démarche très transversale de gestion de projet : chaque groupe formé, travaillait par centres d’intérêt et thématiques. Ce qui permettait à chacun de travailler sur différents aspects de l’évolution de l’entreprise. Ça fonctionnait extrêmement bien ! ( sourire )

Ainsi toute cette gestion de projet, qui nous amenait vers les objectifs que l’on s’était fixés, continuait de tourner. Lorsque l’on se voyait tous les mois, nous pouvions réellement avancer. Et puis, nous avions la transparence des chiffres et des enjeux ! Après, je ne vais pas le cacher, nous avons eu des périodes plus ou moins joyeuses… de stress et de découragement ! Mais globalement, le sentiment que je garde de cette année-là, c’est beaucoup de soutien et d’entraide !

4- Donc tu as tout donné pour essayer de trouver une solution à ce problème. Mais l’entreprise est quand même partie en liquidation judiciaire. Est-ce que tu t’es fait aider dans cette épreuve ?

Oui ! Au moment de la liquidation, j’ai eu connaissance de l’existence de l’association 60 000 rebonds. C’est une association qui est très implantée dans ma région et qui a plusieurs antennes. Lorsque j’ai annoncé, sur les réseaux sociaux, la liquidation de l’entreprise pour pouvoir prévenir les clients, les sous-traitants et les partenaires, j’ai eu beaucoup de messages de soutien. ( sourire ) J’ai eu aussi, des dizaines de messages qui m’indiquaient de contacter l’association 60 000 rebonds. Je me suis donc d’abord occupé de mes clients et de mes salariés. Et ensuite, j’ai pris contact avec l’association. ( sourire )

En quoi 60 000 rebonds t-a-t-elle aidés ?

Il y a deux aspects qui m’ont marquée : la bienveillance du regard de l’équipe. ( sourire ) Quand j’ai été reçue la toute première fois, j’ai vu qu’il y avait une réelle écoute, un réel accueil. Ce sont des gens qui ont l’habitude d’être à l’écoute des personnes qui ne sont pas forcément au top de leur forme. Pour moi, c’était très rassurant ! Je me sentais comme dans un cocon ; ensuite, le double accompagnement. ( sourire ) J’ai eu deux personnes, auprès desquels me confier. Un parrain, qui m’a aidé à retrouver un parcours professionnel et qui m’a guidé dans mes choix. Et un coach certifié, qui m’a accompagné sur le plan du développement personnel. Il m’a beaucoup aidé sur la gestion de mes émotions, notamment. Ce qui m’a permis de prendre beaucoup de recul sur moi ! C’était vraiment un accompagnement sur-mesure. On sent vraiment la générosité de ces personnes.

5- Si tu avais un conseil à donner à des femmes qui, comme toi, sont en situation de liquidation judiciaire, quel serait-il ?

De ne pas rester seule : si l’entourage familial n’est pas présent ou indisponible, c’est une épreuve encore plus difficile à passer. Il est important dans ces moment-là, d’en parler et de se faire aider. Il faut contacter l’association 60 000 rebonds. Ne serait-ce que pour se reconstruire. Il faut participer à leur COPIL : des réunions où l’on peut rencontrer d’autres personnes dans notre cas. Cela permet de réfléchir en groupe, de discuter et de trouver des réponses concrètes sur le rebond.

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