Fleur Belkhir : « Entreprendre dans la restauration est difficile mais pas infaisable ! »

avril 18, 2019

Fleur n’a que 32 ans lorsqu’elle décide d’ouvrir son propre foodtruck, la Fé Fourchette, à la Réunion. Après avoir fait ses armes dans une brigade, auprès de Gilles Goujon, chef étoilé français, elle décide de continuer son aventure dans l’entrepreneuriat. Mais ce n’est pas de tout repos ! Sans un sous en poche, femme, maman et cheffe d’entreprise, Fleur doit se battre pour mener à bien son entreprise. Témoignage.

1 – Fleur, tu es gérante de ton propre foodtruck, la Fé Fourchette, à l’île de la Réunion. Tu as été formée à la restauration par un grand chef étoilé : Gilles Goujon, comment cette formation te sert-elle aujourd’hui ?

Cette formation me sert dans la rigueur du travail, dans la discipline et dans l’amour du métier, des produits. C’est, en résumé, tout ce que cette formation et le chef Goujon m’ont apportée : rigueur, confiance en moi et l’amour du bon mangé ( de la bonne cuisine, en créole ), avec des produits sains et bons.

2- Est-ce que la gastronomie se retrouve dans tes assiettes ? 

Personnellement, je ne qualifierais pas ma carte de gastronomique mais mes clients disent le contraire ! ( rires ) C’est très dure de se juger soi-même ! ( rires ) On me dit souvent que mes produits sont bons, que mes sauces sont très bonnes, que le mélange des saveurs fait de mes produits, des produits gastronomiques. Mais ce que je vends, n’en reste pas moins de la restauration rapide !

Est-ce là, la valeur ajoutée de ton business ?

La différence, chez moi, c’est sans doute de manger sainement. Manger sainement et équilibré ! Dans mon camion, par exemple, je ne vends pas de sodas. Je préfère miser sur des produits naturels : du thé glacé à la menthe, thé glacé au citron, des citronnades, de l’eau… Pareil, pour les frites ! Les frites, chez moi, sont des frites maison. Même mon pain, est frais du matin ! ( rires ) J’essaie aussi de miser sur de l’agriculture biologique…même si c’est difficile ici, d’en trouver.

3- C’est un bon argument de vente ! ( rires ) Une question toutefois, pourquoi choisir le foodtruck, à la Réunion, plutôt que ton propre restaurant ?

Par choix financier ! Je n’avais pas d’apport… A la place, je me suis installée à la Réunion, qui est une île magnifique ! A choisir entre Paris et la Réunion, – je suis désolée pour les parisiens ( rires ) – je préfère la Réunion : il y a le soleil, la plage, c’est un environnement très cosmopolite en plus…
Du coup, je me balade avec mon camion et je vais là où l’on veut bien de moi. Le but ultime de mon foodtruck, c’est de récolter assez de fonds pour ouvrir ma petite saladerie ou mon petit restaurant. J’y vais ti lamp, ti lamp ! (à petits pas ! ).

Et quand tu dis que tu as eu des problèmes financiers… Est-ce juste le manque d’apport, qui te posait problème ? 

Je n’avais pas les fonds pour monter mon business… Je viens d’une famille monoparentale, assez modeste donc je n’avais pas la possibilité de demander une aide financière. Quand j’ai voulu monter mon affaire – j’avais alors 32 ans -, les banques ne m’ont pas accordée de crédit… même avec un bon dossier, du soutien et des signatures ! Je n’ai jamais su si c’était parce que je suis une femme ou si c’était parce que je n’avais pas de fond pour monter le projet…

On peut dire que j’ai commencé toute petite, avec très peu de moyens pour lancer mon business. Et je ferai de même pour créer mon restaurant !

Je suis donc rentrée en Couveuse d’entreprise. Là, j’ai monté un dossier pour la région afin d’avoir un petit crédit. Notamment auprès de l’ADIE. J’ai ensuite cumulé ma création de projet avec du service à domicile, comme cheffe, pour monter ma trésorerie. Et j’ai acheté mon camion ! Avec le foodtruck, j’épargne pour ouvrir mon restaurant, sans l’aide des banques.

Est-ce que tu recontres des difficultés avec les collectivités, aussi ?

On a énormément de difficultés ! Nous sommes nombreux à prétendre au même service et les communes ne veulent pas de foodtruck ! On est obligés de se mettre sur des terrains privés et donc, de payer un loyer. S’il était possible de faire de même avec les mairies et les collectivités, ça nous permettrait de louer des emplacements publics, deux à trois heures par semaines… mais ils ne veulent pas ! La seule commune qui l’accepte, c’est Saint-Denis, la capitale. Ce n’est pas très motivant !

Ça vous fait un réel manque à gagner !  

Personnellement, cela m’oblige à ne travailler que deux jours par semaines : les lundis et les vendredis car je paie un emplacement privé. Les autres jours de la semaine, ce terrain est loué a d’autres foodtruck et je n’ai pas d’autres emplacements… J’essaie d’équilibrer avec des manifestions, des salons ou des foires les week-ends…

4- On sent que c’est un combat éreintant… J’imagine que ca devait être aussi le cas, dans ta formation. C’est un milieu connu pour être très masculin et compétitif. Côtoyer ce monde te sert-il ajourd’hui, dans ton rôle d’entrepreneure ?

Je pense ! Je dois beaucoup à mon chef ! La restauration est un métier d’homme, il faut avoir les reins solides, comme il me disait souvent. Cette formation m’a donnée la niaque, la passion, la force de me surpasser, d’avoir confiance en moi. Et ce, même dans les coups durs !

5- Si tu avais un conseil à donner, à des femmes ou à des porteuses de projet qui comme toi, veulent se lancer dans les métiers de bouche, quel serait-il ?

De foncer : ne pas avoir peur. Il faut y aller, avoir confiance en soi et croire en soi surtout ! Croire en soi, savoir que l’on peut y arriver, est essentiel.

 

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