Camille Pichon est une jeune startuppeuse, décidée à ce que son entreprise fonctionne… même si elle est une femme ! Après avoir subi des réflexions et des comportements sexistes à différent stade de sa création d’entreprise, elle décide de dénoncer. Témoignage.
1- Camille, tu es CEO de la startup Rocambole, comment as-tu trouvé ta place dans ce monde si masculin de la startup?
Alors ça, c’est une bonne question ! ( rires ) Trouver ma place, a été quelque chose d’assez difficile au début. Je suis vraiment partie d’une idée et la startup est venue ensuite. Je ne me suis pas lancée dans l’entrepreneuriat, juste pour me lancer dans l’entrepreneuriat ! J’ai dû progresser et apprendre le métier de cheffe d’entreprise. J’apprends encore aujourd’hui d’ailleurs ! ( rires ) Au début c’était très dur car c’est un monde qui m’était complétement inconnu. Trouver ma place en tant que personne était difficile, parler de mon idée et porter ma vision aussi. Mais en tant que femme, c’est un travail de tous les jours ! ( sourire )
Comme je le disais dans mon article sur LinkedIn, parfois on n’est pas considérées, parfois on l’est ! Mais il faut quand même nuancer ! Il existe des hommes et des femmes extrêmement respectueux ( sourire ) Toujours est-il, que c’est un véritable travail de confiance en soi ! Prouver que l’on a de la valeur par son travail, ce n’est pas toujours évident !
2- Est-ce que dans ta création d’entreprise, tu as déjà eu affaire à des difficultés liées à ton statut de cheffe d’entreprise ?
Oh oui ! Tout à fait ! ( rires ) Surtout lorsque je devais parler dans les comités de financement ! Ça été quelque chose d’extrêmement difficile. C’était couplé par mon jeune âge et par mon genre. Ce n’était pas dit explicitement mais j’en avais le sentiment ! Le rapport qu’ils avaient avec mes associés, du même âge que moi, marquait la différence ! Avec les prestataires aussi, c’était difficile de se faire prendre au sérieux. Pourtant, j’avais juste envie de créer ma société ! J’ai eu le sentiment qu’il fallait que je me batte tous les jours pour me faire valoir !
3- Est-ce que tu dirais que ton genre, est finalement un frein à la création de ton entreprise ?
En fait, je dirai que c’est un tout ! D’un côté il y a des préjugés du genre : par exemple, lorsque l’on arrive dans les comités de financement, qui sont dirigés par des hommes de plus de 55 ans, chefs d’entreprise depuis 30 ans – c’est une réalité ! -, et qu’on est la seule femme autour de la table… Là, on sent qu’on n’a pas notre place. Et d’un autre côté, il y a aussi l’effet « startup » ! Aujourd’hui, beaucoup de startup se lancent, font beaucoup de bruit… il faut donc prouver d’autant plus que son idée est bonne car une certaine méfiance existe. Donc je dirai qu’il y a la question du genre, de la jeunesse et le fait que les startups ne sont parfois pas prises au sérieux.
4- Selon toi, qu’est-ce qui expliquerait ces comportements machistes ?
On est encore dans une société très patriarcale ! C’est indéniable ! Ça ne fait pas si longtemps que les femmes ont le droit de voter, alors créer une entreprise ! ( rires ) Il y a des habitudes bien ancrées, inconsciemment ou non. Il y a encore quelques années, c’était très rare qu’une femme crée sa société. C’est pour cela qu’aujourd’hui, il y a des préjugés. Les solutions, à mon sens, passe par l’éducation. Il faut apprendre aux femmes qu’elles peuvent entreprendre. À l’école, jamais on ne m’a dit que je pouvais entreprendre si je le souhaitais. La question de l’éducation est donc très importante ! Tant chez les jeunes femmes, que chez les jeunes hommes. Il faut faire changer les mentalités et les faire évoluer ! Entreprendre ce n’est pas une question de genre ! C’est une question d’idée, de vision à apporter. Je ne comprends pas, encore aujourd’hui, ce manque de modernité chez certaines personnes…
5- Quel conseil donnerais-tu à des porteuses de projet, qui comme toi, subissent ce type de sexisme dans la création de leur entreprise ?
De rester focaliser sur leur projet : se centrer sur sa création d’entreprise permet de passer au-dessus de ce type de réflexions et de situations. Sans pour autant les accepter ! Il faut, au contraire, le dénoncer. Non pas de manière frontale, car souvent ça amène à de l’incompréhension mais essayer d’en parler ! Personnellement, je n’ai jamais vu d’article sur ces sujets-là. Je n’ai jamais lu de témoignage dessus. Il faut donc le dénoncer, de manière correcte, et avancer tout en s’accrochant à son projet. Continuer d’entreprendre est essentiel ! Être une femme fait partie des difficultés de la création d’entreprise.