Alix et Emilie, référentes handicap : “On emploie avant tout une personne, pas un handicap !”

décembre 4, 2023

Emilie et Alix sont deux Référentes Handicap à leur compte. Pour elles, sensibiliser et dédramatiser les situations de handicap est un combat quotidien. Pour une société plus juste et plus inclusive, elles proposent leurs services d’accompagnement et de conseil. Le handicap reste une affaire de tous et est compatible avec l’entrepreneuriat.  

Alix : Aujourd’hui, il y a de plus en plus d’initiatives pour accompagner les personnes en situation de handicap dans leurs projets entrepreneuriaux. Il existe, entre autres, l’association H’Up. Elle soutient et accompagne des entrepreneurs en situation de handicap pour pérenniser et accélérer leurs projets. Ils peuvent être à l’origine de solutions et d’offres de services disruptives qui répondent à de vrais besoins. Donc on voit bien, à travers ces expériences, que le handicap et l’entrepreneuriat ne sont pas du tout incompatibles. C’est plutôt, une source de créativité et d’innovation.

Emilie : J’ajouterais, sous un autre prisme, que la situation de handicap est très individualisée. Le fait d’être une entrepreneure qui accompagne les personnes en situation de handicap me permet de proposer des services sur-mesure et de coller au strict besoin de la personne ou de la structure que je vais accompagner. On ne peut pas faire une généralité du handicap. C’est beaucoup trop personnel et différent selon les situations. 

A : Oui, ça me touche personnellement mais c’est surtout, à travers une expérience professionnelle que j’ai découvert le secteur du handicap. Ce qui est le cas de 95% des personnes qui font notre métier.  Nous sommes tous concernés, de prêt ou de loin, par le handicap. Je me trompe peut-être mais, je pense qu’on se lance rarement de façon spontanée dans ce domaine sauf si l’on a lien avec le handicap.

E : Je ne suis pas concernée, à titre personnel. Je dirais que je suis “tombée” dans le handicap de façon imprévue. Je cherchais un job de conseillère en insertion professionnelle, dans le cadre d’une reconversion, quand j’ai été recrutée par une association qui accompagnait un public de demandeurs d’emploi et de salariés reconnus “travailleur handicapé”. C’est là que j’ai découvert le handicap et que j’y ai trouvé du sens. Aujourd’hui, c’est une vocation. Ça me parait tellement logique de continuer dans ce domaine.

E : “Tabou” je ne sais pas si c’est le terme. Ce qui est sûr, c’est que ce n’est pas simple d’en parler. Il est encore assez difficile aujourd’hui de dire que l’on se trouve en situation de handicap. Même si parler de “situation de handicap” – et non plus se focaliser sur la maladie- , change la donne, cela reste discriminant et peu intégré dans notre société actuelle. 

A : Je rajouterais aussi que le mot “handicap” reste très stigmatisant et stigmatisé. Comprenons, par-là, que même les personnes concernées peuvent faire preuve d’auto-censure. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, le jugement ne vient pas que de l’extérieur. Parfois, il vient de la personne elle-même. La reconnaissance du handicap peut vite devenir lourde à porter.

E : Oui, mais d’une entreprise à une autre, le sujet sera traité de façon différente. Il y a des entreprises qui vont “occulter” les situations de handicap, quand d’autres vont prendre le sujet à bras le corps. Ce que je constate, c’est surtout le manque de connaissance sur le sujet. Les entreprises n’ont pas, pour la plupart, une vraie et claire définition du handicap. La méconnaissance est donc le problème à régler.

A : Je suis d’accord avec Emilie. Souvent, le handicap est un non-sujet. Les entreprises ne veulent pas l’aborder. Parfois même, j’observe que le handicap est vu essentiellement comme une contrainte.

A : Le handicap est un sujet mal connu. Donc le fait de sensibiliser, le visibilise. On le conscientise et on libère ainsi la parole des personnes concernées. Elles osent plus facilement en parler. Après, cela dépend des typologies d’entreprise aussi. J’essaie toujours de montrer les avantages à mettre en place une politique handicap et les bénéfices qu’elles peuvent en tirer. Aujourd’hui, il y a un nombre important d’études qui montrent la valeur-ajoutée des collaborateurs en situation de handicap. Ce sont des personnes résiliantes, avec une faculté d’adaptation importante… Ces softs skills sont une force pour une entreprise. 

E : Effectivement, nous sommes-là pour dédramatiser le handicap. Soit auprès de l’entreprise, en lui montrant qu’il existe des solutions, soit auprès de la personne handicapée qui se retrouve du jour au lendemain en inaptitude à son poste de travail. Après tout, une personne en situation de handicap ne veut pas dire pour autant qu’elle ne peut plus rien faire. Au contraire ! Elle peut faire des tas d’autres choses. Donc dédramatiser et montrer qu’il existe des solutions simples à mettre en place est notre mission. On accompagne du recrutement jusqu’au maintien dans l’emploi. Avant d’être des personnes en situation de handicap, ce sont avant tout des personnes avec des compétences. Et l’on sait aujourd’hui à quel point il est important pour une entreprise de conserver ses talents.

A : Je dirai “non”. Cette obligation de 6% existe depuis 1987. Elle est toujours à 3,5% en moyenne en France. Les obligations ne sont pas, à priori, des leviers suffisamment efficaces. A l’échelle des PME, les contributions sont assez faibles, même si elles vont augmenter en 2024. En tout cas, ce n’est pas par ce biais-là que je sensibilise les entreprises. C’est encore une fois grâce à la QVCT et aux bénéfices de l’inclusion… Les 6% ne sont pas un sujet selon moi.

E : C’est aussi une histoire d’inclusion dans la société, au sens global. Une vulgarisation qu’il faudrait réussir à porter pour faire comprendre que, quelles que soient nos caractéristiques, femmes ou hommes, nous devrions pouvoir vivre ensemble dans la société. Je trouve cela dommage de stigmatiser par le quota et de faire rentrer les gens dans des cases. C’est insupportable. En ce qui me concerne, j’accompagne des humains en situation de handicap. C’est là-dessus, je pense, qu’il faut que nous fassions évoluer les mentalités. L’inclusion de tous. C’est l’histoire de chacun pour oeuvrer à son niveau. 

E : Il n’existe pas de baguette magique à ce sujet. A part continuer avec notre bâton de pèlerin à communiquer et à vulgariser au quotidien – et pas juste une semaine par an lors de la semaine du handicap SEEPH -, je ne vois pas. Faire comprendre que nous avons tous une place dans la société est important.

A : Je suis d’accord aussi. Je n’ai pas de recette magique. Il faut lever au maximum les biais cognitifs et les préjugés. Sensibiliser, évangéliser et dédramatiser le handicap sont les bases. On emploie avant tout une personne, pas un handicap. De toute façon, avec le recul de la retraite et la hausse des problèmes liés à la santé mentale, nous pouvons tous être concernés par des situations de handicap. Il faut donc s’y préparer. 

E : De ne rien lâcher et de croire en elles. Si elles pensent que c’est leur mission, elles pourront y arriver. Elles montreront ainsi, qu’elles ont raison. Etre soutenues et faire partie d’un collectif permet aussi de voir les choses plus simplement. Pour moi, s’appuyer sur des réseaux locaux et nationaux est une façon de faire avancer les mentalités et les objectifs. Pour une cause, il faut tous s’y mettre. 

A : Beaucoup de ténacité. Ce n’est pas le choix le plus simple mais, chaque petite action est une victoire. Si elles contribuent à sensibiliser, c’est gagné. Je dirais que c’est important d’appartenir à un collectif ou un réseau. Partager les expériences et les expertises permet d’avancer et c’est une richesse pour aborder et progresser sur tous les sujets. 

Partagez cet article !

ADOPTE TON RÉSEAU

ADOPTE TON RÉSEAU

Envie d’en savoir plus sur les réseaux ? Télécharge GRATUITEMENT notre guide

 

A découvrir

× Contactez-nous !