« Qui veut-être mon associé ? » : quand la TV entretient les clichés sur l’entrepreneuriat féminin

janvier 31, 2020

Suivez-vous l’émission  » Qui veut-être mon associé ? » de la chaîne télévisée, M6 ? Outre la mise en avant de projets entrepreneuriaux plus riches les uns que les autres, l’émission entretiendrait toutefois, des clichés sur l’entrepreneuriat féminin. Explications.

Selon l’étude américaine « The Gendering of Entrepreneurship on Reality Television », les émissions de téléréalité comme « Qui veut-être mon associé ? », accentueraient les stéréotypes sur les entrepreneures. Ainsi, l’homme serait le meilleur type de chef d’entreprise, les femmes seraient plus souvent dans les secteurs sociaux et auraient une valorisation de leur entreprise, plus faible.

Une émission, une étude, des clichés

Le 14 janvier dernier, la chaîne M6 diffusait le premier épisode de son émission « Qui veut-être mon associé ? ». Un programme qui consiste à inviter sur le plateau, des entrepreneurs en quête d’investissement. Leur job ? Pitcher ( vendre ) leur projet à un jury d’experts, eux-mêmes chefs d’entreprise, prêts à investir leur temps et leur argent. Cette émission est une adaptation française d’un concept, existant déjà dans plus de 30 pays et dont les deux versions les plus connues sont : « Skark Tank » ( Aquarium à requins ) dans sa version américaine, et « Dragon Den » (La tanière aux dragons ) dans sa version britannique.

Ces émissions ont donc fait l’objet d’une étude, réalisée par des journalistes économiques et des chercheurs. S’il est encore trop tôt pour tirer des conclusions sur la version française de l’émission, l’étude affirme pourtant que les versions américaines et anglaises contribuent à renforcer un certain nombre de préjugés sur l’entrepreneuriat féminin. Celle-ci s’est d’ailleurs organisée en 3 grands axes de recherches, basés principalement sur nos représentations de l’homme, chef d’entreprise :

  • L’individu. C’est-à-dire, la personne et son comportement ;
  • l’activité. Les secteurs dans lesquels se développent les entreprises ;
  • la moralité. Les motivations et les valeurs des projets.

La représentativité inégale des femmes accentue les clichés

Concernant le type d’individu qu’est l’entrepreneur, les chercheurs trouvent que le chef d’entreprise type est masculin. En effet, la représentativité des porteurs de projet, dans ces émissions, est inégale : les hommes sont deux fois plus nombreux que les femmes, chez les candidats.
Une représentation disparate aussi dans le jurys, où 4 investisseurs trônent à côté d’une seule investisseuse. C’est un constat que nous pouvons aussi retrouver dans l’émission française, puisque 4 investisseurs sont présents, pour 2 investisseuses.

Par ailleurs, l’examen des actions et des traits de personnalité affichés par les entrepreneurs dans ce contexte, montre que les hommes demandent significativement plus d’argent que les femmes ( 63% d’entre eux demande plus d’argent initialement ). Parallèlement, les candidates ont deux fois moins de chances d’être montrées en train de négocier. À l’inverse, elles ont été montrées à l’écran, en train de prendre conseil auprès de leur mari.

Les entrepreneures créeraient majoritairement dans le social

Et le constat sur les secteurs d’activité des entrepreneures, n’est pas plus glorieux ! 95% des pitchs étudiés, concernent des projets technologiques menés par des hommes. Seuls 75% des projets faisaient figurer des femmes, principalement dans le secteur social ( secteur du « care » ou du bien-être ) : cosmétique, enfants….

C’est une dimension que nous pouvons également retrouver dans l’émission « Qui veut-être mon associé ? ». Dans les épisodes passés, les téléspectateurs ont pu découvrir des projets féminins, centrés sur le handicape et le mieux-vivre des personnes malades. Lors de l’épisode 2 par exemple, le projet des jumelles designers industrielles, s’inscrivait davantage dans le social, bien que le textile intelligent soit l’origine de leur produit. Leur plaid sensoriel, Maase, a néanmoins été créé pour apaiser les symptômes psycho comportementaux de personnes handicapées ou bien atteint de la maladie d’Alzheimer.

Entreprendre, pour gagner en liberté

Enfin concernant les valeurs des entreprises, deux axes ont été mis en avant par l’étude : pour les entrepreneurs, créer leur entreprise permet de subvenir aux besoins financiers de leur famille ; pour les entrepreneures, la création d’entreprise permet une certaine liberté. Notamment, celle de passer plus de temps avec leurs enfants, comme le démontre le phénomène des mampreneures. Pour elles, c’est une façon aussi d’étendre le budget de leur famille, en gagnant de l’argent supplémentaire.

Bien que l’émission « Qui veut-être mon associé ? » surfe sur la vague de l’entrepreneuriat, le concept lui, accentue les inégalités entre les entrepreneurs femmes et hommes. Outre l’enrichissement qu’apporte l’émission sur toutes les questions de la création d’entreprise, le manque de parité chez les candidats et le jurys, ne favorise pas l’image de l’entrepreneuriat féminin.

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