Bénédicte est une jeune entrepreneure, installée à Mulhouse. Elle a ouvert sa friperie, Aujourd’hui et demain, afin de promouvoir l’économie circulaire. Un projet ESS, que cette congolaise expatriée mène de front pour sensibiliser à la préservation de nos ressources. Pour elle le changement est accessible à tous, pour peu que nous en ayons conscience.
1- Bénédicte, tu as ouvert la friperie Aujourd’hui et Demain. En quoi est-ce que celle-ci est économique sociale et solidaire ?
Il y a pleins de réponses à cela (sourire) ! : la performance économique parce que nos prix sont abordables et accessibles à tous. L’entreprise est donc durable. C’est-à-dire, qu’elle perdurera dans le temps ; l’utilité sociale car, nous proposons un véritable accompagnent aux clients. Nous avons une relation de proximité. Nous sommes-là pour répondre à leurs questions, que ce soit sur l’éco-responsabilité ou la seconde main. Nous échangeons également sur les bonnes pratiques et organisons des ateliers pour les sensibiliser à la slow fashion; la solidarité, puisque nous sommes tout le temps, dans le partage d’expérience. Ce système favorise le circuit-court. Il est un cercle vertueux.
Et derrière ce circuit, ce n’est pas qu’une question de moyen. C’est aussi, une question d’engagement à la préservation des ressources. Tous les vêtements que nous portons demandent d’utiliser d’énorme quantité de ressources pour les confectionner. Accorder une nouvelle vie aux vêtements que nous portons, préserve donc la planète. Nous allons-là, à l’encontre de la fast fashion et revenons à un mode de consommation passé.
2- Ce combat pour plus d’équité et plus de préservation de la planète, n’est-il pas aussi un combat contre les préjugés ?
Oui, tout à fait. Malheureusement en France, comme ailleurs je suppose, les friperies ont une mauvaise image. Elles renvoient une idée de “bazar”, non ordonné et sale. Rien que sur ce point, Aujourd’hui et demain se bat pour montrer l’inverse. Les friperies peuvent être des endroits agréables et chaleureux (sourire).
Ensuite, il y a les préjugés sur les clients. Pour beaucoup de personnes encore, les clients de friperie seraient “pauvres”. Ce qui est faux. Mais comme le concept a été associé aux associations de lutte contre la pauvreté… Les clients de friperie essuient encore cette image.
Avec Aujourd’hui et Demain, je veux donc montrer que l’on peut acheter de la seconde main pour préserver la planète, tout en luttant contre les préjugés de notre société. Pour moi, c’est une façon de repenser l’économie de notre société : l’argent n’est plus un but mais un outil au service du social.
3- En quoi est-ce important, de nos jours, de comprendre et d’avoir cette notion en tête ?
C’est important parce qu’elle va nous driver dans nos choix de tous les jours. Penser que l’argent peut être un moyen, et non plus un but à atteindre, nous permet de voir la vie sous un autre angle. Nous réfléchissons plus aux répercussions et aux conséquences de nos actes.
Pour moi, c’est une façon de mettre ma pierre à l’édifice. Nous ne serons pas tous des politiques ou de grands acteurs de changement. Ceci dit, nous pouvons quand même y contribuer à notre échelle. Nous pouvons être acteurs dans la lutte contre le gaspillage et la lutte pour la préservation de la planète. Nous avons tous un rôle à jouer. Soyons actifs plutôt que passifs.
4- Sont-ce là, des valeurs qui t’ont été enseignées dans ton éducation ?
Oui, ce sont des valeurs que je porte depuis que je suis petite. Certaines m’ont été enseignées par ma famille. Je viens d’une famille nombreuse. Même si mon papa est médecin, nous n’avons pas été habitués à vivre dans la surconsommation. Nous réparions, avant tout, ce qui pouvait l’être plutôt que d’acheter encore et encore. Ce sont de réels habitudes qui nous ont été inculquées. D’autres, ce sont des convictions personnelles dues à mes observations, à mes recherches et à mon expérience de vie.
5- Si tu avais un conseil à donner à des femmes qui, comme toi, se battent contre les préjugés et pour une vision plus juste de notre société, qu’est-ce que tu leur dirais ?
De ne pas avoir peur de partager leurs valeurs : même si cela ne peut être fait à grande échelle, de le partager quand même. La peur ne devrait pas être un frein à leurs convictions. Je pense vraiment que nous pouvons changer les choses par nous-mêmes. Notamment, notre modèle de consommation actuel. Nous en sommes les premiers acteurs. Pour cela, croire en son projet et croire en soi sont des clés importantes. Assumer ses convictions est tout aussi important, même si cela est dur. Pour autant, ça en vaut vraiment la peine.