Depuis le début d’année 2025, l’aide à l’embauche pour les postes en alternance est passée de 6 000 à 5 000 euros, voire 2 000 euros dans certains cas. Une décision nationale qui touche toutes les entreprises, en particulier les TPE et PME. Le gouvernement justifie ce recentrage par des raisons budgétaires. Mais sur le terrain, les impacts pourraient freiner les recrutements. Voici ce qu’il faut savoir.
Ce qui a changé depuis le 24 février 2025
La réforme touche directement le budget des entreprises. L’aide à l’embauche d’un alternant passe de 6 000 à 5 000 euros, pour les entreprises de moins de 250 salariés. Et ce dès la première année du contrat. Les entreprises de plus de 250 salariés, elles, toucheront 2 000 euros d’aide, sous conditions. Tout cela concerne les apprentis comme les contrats de professionnalisation, et s’applique à toutes les tailles d’entreprise.
Le ministère du Travail défend une stratégie de “ciblage” : plutôt que de maintenir une aide généralisée, le gouvernement veut concentrer l’effort sur les publics les plus éloignés de l’emploi. Résultat : un soutien financier moins attractif pour les entreprises qui misaient sur l’alternance comme outil de formation interne.
Des conséquences concrètes pour les petites structures
Pour les TPE et PME, cette baisse change la donne. Perdre 1 000 euros par alternant, c’est parfois devoir renoncer à un recrutement ou réduire la durée du contrat. Certains secteurs comme la restauration, le bâtiment ou l’industrie, déjà en tension, alertent sur un ralentissement possible des embauches.
Dans plusieurs régions, les acteurs économiques soulignent que l’alternance permettait jusqu’ici d’attirer des jeunes motivés tout en formant sur mesure. Sans aide suffisante, le risque est de voir certaines entreprises délaisser cette voie pourtant essentielle à la transmission des savoir-faire. D’autres préfèrent maintenir les alternances dans les métiers manuels. C’est le cas de Maryan Lhuillier, dirigeant de Formdetoit, entreprise alsacienne de rénovation de toiture, isolation écologique et pose de fenêtres de toit Velux. Il insiste sur l’importance historique et technique de l’apprentissage dans les métiers de terrain :
« Sur les métiers de production, comme ici le métier de couvreur-zingueur, c’est un moyen essentiel d’apprendre. C’est la base depuis la nuit des temps, à l’époque des cathédrales c’était déjà comme ça. Nous avons donc décidé de privilégier le recrutement en alternance sur ces postes-là plutôt que les métiers en back-office comme la partie communication, la partie commerciale et administrative », explique-t-il.
Mais ce choix stratégique n’est pas sans regret. En tant que dirigeant attaché à la formation, Maryan confie qu’il a dû faire des arbitrages difficiles, contraires à ses convictions personnelles :
« Objectivement je trouve ça très regrettable parce que la transmission fait partie de mes valeurs fondamentales. Je trouvais ça intéressant l’alternance sur des métiers de back-office parce que c’est tout aussi important. Mais à termes, ce n’est plus aussi rentable, on ne peut plus faire les deux. C’est vraiment un profond regret. En tant que dirigeant de TPE il n’est pas envisageable de continuer, il n’y a plus d’équilibre ».
Moins d’alternance, plus d’interim : une dynamique d’entreprise fragilisée
Faute de soutien financier, les postes administratifs et de communication sont désormais confiés à des intérimaires ou à des prestataires externes. Une solution fonctionnelle à court terme, mais qui a des conséquences sur la cohésion et l’investissement collectif.
Maryan observe un changement profond dans la dynamique de l’entreprise, dû à la disparition d’un lien durable avec ces nouveaux profils :
« On ne peut pas valoriser ça sur la dynamique d’équipe alors que quand on avait des alternants en communication ou gestion de TPE/PME, il faisait clairement partie de l’équipe, une stratégie globale était installée. Maintenant malheureusement, c’est difficile de le faire avec des intérimaires ou des prestataires externes ».
En réduisant les aides à l’alternance, l’État choisit de recentrer sa politique sur les profils les plus fragiles. Une décision budgétaire assumée, mais qui oblige les entreprises à s’adapter rapidement. Pour continuer à former, transmettre et recruter efficacement, elles devront trouver de nouvelles marges de manœuvre.