Vous venez d’apprendre que vous allez être maman ? Passé le bonheur des premiers jours, voilà le moment de se poser la question du congé maternité. Mais qu’en est-il réellement pour les entrepreneures ? Elles sont mamans dans le Grand Est. Pour nous, elles racontent leur expérience.
“J’ai monté mon entreprise au moment de ma 3e grossesse et paradoxalement, je l’ai vécu vraiment sans stress. Je n’avais pas la pression de mon entreprise, même si la question financière m’a un peu inquiétée”. Cette expérience, c’est celle de Louise. Son entreprise de produits faits maison basée à Thionville, elle l’a lancé fin 2019.
À l’époque, les indépendants venaient tout juste de quitter le Régime spécifique et d’être affiliés au Régime général de la Sécurité Sociale. Une promesse d’Emmanuelle Macron lors de sa campagne, d’assurer une égalité à toutes les mères actives, quelqu’en soit le statut social, en instaurant un congé maternité unique.
Et une promesse tenue. Les entrepreneures bénéficient donc aujourd’hui, d’une durée de congé maternité quasi-identique à celle des salariées et d’un remboursement des soins égaux. Mais, les problématiques et les inégalités ont-elles réellement disparues pour autant ?
“Je suis auto-entrepreneure, quelles aides pour mon congé maternité ?”
Des questions comme celle-ci, on en trouve des dizaines dans la Foire aux Questions de la Sécurité Sociale du Grand Est (et dans notre boite mail aussi ! Ndlr). Une question que l’on se pose rarement comme salariée : on déclare sa grossesse à la Sécurité Sociale; on calcule son montant minimum par jour en fonction de son salaire (9,53€ par jour en moyenne). Et le tour est joué ! Mais quand on est entrepreneure, les choses se corsent… .
Le site de la Sécurité sociale stipule : “En cas de congé maternité, les auto-entrepreneurs peuvent percevoir simultanément une indemnité journalière forfaitaire d’interruption d’activité et une allocation forfaitaire de repos maternel”. Pour en bénéficier, l’entrepreneure doit donc présenter la feuille d’examen prénatal du 7e mois pour un premier versement, et le certificat d’accouchement pour un second versement. Elle doit également justifier d’un arrêt de 8 semaines consécutives de son activité, dont les 14 jours précédents l’accouchement. Ceci, pour avoir l’espoir d’obtenir le montant des indemnités, calculé ainsi sur les 3 derniers revenus. “Le congé maternité est basé financièrement sur notre résultat et il est plafoné. Il n’est pas hyper avantageux” explique Aurélie Ponzo, Présidente du Réseau Mampreneures.
À noter que depuis le 1er janvier 2020, être à jour dans ses cotisations n’est plus une condition sinéquanon. Mais alors comment cela se passe-t-il quand on vient de débuter son activité et qu’on ne dispose que de peu de revenus ?
5,83€ journalières !
Le chiffre semble dérisoire et pourtant… 5,83€ c’est le montant auquel peut prétendre une entrepreneure, si ses revenues sont inférieurs à 4 046,40€ par an en 2021. Un montant insuffisant qui force de nombreuses entrepreneures à faire l’impasse sur une partie de leur congé maternité.
“Quand je suis tombée enceinte, je venais de lancer mon activité. Je n’avais pas assez de chiffre d’affaires donc, je ne pouvais prétendre qu’à 150€ par mois. Et en plus, il aurait fallu que je m’arrête 8 semaines. Mais c’était clairement pas possible ! Donc j’ai continué à travailler sans le déclarer, pour continuer à toucher mes allocations chômage de l’époque. Je me suis juste arrêtée un mois, parce que j’e n’en pouvais plus”, nous avoue Julie.
Comme elles, de nombreuses entrepreneures font le choix de prendre un congé maternité plus court. Si le montant des indémnités pèse dans la balance, ce n’est pas toujours la seule raison. “Quand je suis tombée enceinte, on était en pleine recherche de partenaires avec mon conjoint. Je ne pouvais pas me permettre de me mettre en congé. C’était maintenant ou jamais. J’ai préféré réduire mon congé maternité. Et même pendant, je continuais à travailler” explique Rose-Marie, jeune entrepreneure dans le milieu de l’innovation.
Il faut dire que la première année est cruciale dans la vie d’une entreprise. C’est là que tout se joue. Et les aides ne sont pas toujours adaptées aux problématiques spécifiques des parents entrepreneures. À noter que pour les pères, la sentence est la même.
Congé maternité, des aides spéciales dans le Grand Est ?
Depuis 2018, le Grand Est a tout misé pour favoriser l’entrepreneuriat des femmes et aider à la réductions des inégalités en entreprise : aides spécifiques pour les créatrices, accompagnements personnalisés, partenariats égalité… . Pourtant, la question de la maternité est complètement absente du débat.
Un détail important pourtant, quand on sait que la discrimination envers les femmes dans le milieu professionnel commence dès l’embauche par : “Est-ce que vous comptez avoir des enfants ?”. Une question d’autant plus compliquée, lorsque l’on est parents et entrepreneurs.
Si des aides à l’échelle nationale sont mises en place, comme l’aide à la garde d’enfants proposée par le Crédit d’impôt Famille, les aides Régionales sont d’avantages aléatoires, voire absentes. Comme c’est le cas dans le Grand Est, à l’instar de la Région PACA où une aide financière à la garde d’enfant a été mise en place.
Actuellement, les femmes représentent 40% des créateurs d’entreprise. La plupart sont mamans ou envisagent de l’être dans les années à venir. “On parle de l’entreprenariat des femmes. La loi Rixin va dans se sens. Mais il faut aussi penser à la femme dans toutes ses particularités. Il faudrait, par exemple, mettre en place un dispositif de congé maternelle compatible avec le mode de vie des indépendantes”, explique Aurélie Ponzo, Présidente du réseau des Mampreneurs. Un réseau nationale unique en France, avec une antenne dans le Grand Est.
En mars 2021, la Fédération Nationale des Auto-Entrepreneurs (FNAE) publiait une étude réalisée auprès de 899 femmes. Pour 46,7% d’entre elles, le montant insuffisant des indémnités journalières de congé maternité leur aurait fait repousser leur projet d’enfant à plus tard.